Faire allusion à trois objets: une clé, une statue et… un portrait d’Arthur Rimbaud, objets réels, et pas seulement les mots qui doivent être évoqués dans le texte…
Placer les trois expressions suivantes :décrocher la lune, être réglé comme du papier à musique, quand les poules auront des dents.
Quand les poules auront des dents ?

Il était une fois un bois,
Dans ce bois une clôture,
A cette clôture, accrochés tubes de dentifrice et brosses à dents.
Brosses à dents, pour quoi faire ?
Faire croire que ce dicton « Quand les poules auront des dents »,
Était réglé comme du papier à musique ?
Musique sinistre de ce bois, encombré de vestiges,
Vestiges d’humains,
Humains sans papiers, sans visages ?
Au mur de mon salon, Arthur Rimbaud juvénile et regard inquiet écoute mes pensées.
Je ne suis ni voyant, ni lecteur de marc de café, me révèle-t-il.
Café que songeuse, tourmentée de ces visions,
Je tourne, et retourne, dans ma salle de bains, musique automatique de la petite cuiller,
Mon breuvage est froid, l’eau déborde de la baignoire.
On sonne à la porte, on tambourine à la porte.
Porte secouée, enfoncée, je n’ai pas eu le temps de tourner la clé dans la serrure.
Un inconnu vocifère.
Vocifère, me bouscule, arrête le robinet,
Robinet d’eau et de ses paroles,
Me tend un peignoir, je suis nue,
Pose ma tasse sur l’évier,
Éclate de rire.
» Je suis sculpteur; accepteriez-vous de poser pour moi ? »
» A qui appartiennent ces brosses à dents ? m’entends-je lui répondre.
» C’est une longue histoire. » répond-il, une lueur triste au fond des yeux.
» Venez chez moi, je vous raconterai…
« Il était une fois…
Alors je comprends, je vois cette jungle, cette vie d’errance et de pourchassés, de froid, d’humiliations, de privations mutilantes.
Pourtant, il me dit sa joie, ses belles rencontres, qu’il croit qu’un jour ou l’autre on arrive à décrocher la lune,
Même dans notre monde d’indifférences, de vérités toutes faites, de désinformations.
Nous sommes dans son atelier, bric à brac d’objets de tous les jours,
Je l’écoute, il me parle,
Je l’entends, il me comprend.
Il raconte et dessine sa vie d’avant,
Un parc, des oiseaux, une statue,
Ma statue, moi qui contemple ce semblant de vie en dignité.
Cette photo fait partie d’une exposition de photos, prêtée par la Cimade, dans le cadre de la Semaine des Solidarités en 2017.
( D’autres photos témoignages des conditions de vie des migrants sont visibles à l’article Inhospitalité, paru sur mon blog)